Trop semblable à l'éclair (Ada Palmer)
Comme ce site le montre trop régulièrement ,je n’ai généralement pas besoin de grand chose pour m’inciter à acheter des livres. Mais si je suis déjà dans une librairie et que le podcast que j’écoute (en l’occurrence C’est plus que de la SF) vante un livre de SF et interviewe l’autrice, pour un livre dont l’univers semble mettre en pratique des principes anarchistes, le livre est déjà dans mes mains.
Terra Ignota
- Trop semblable à l’éclair
- Seven Surrenders
- The will to battle
- Perhaps the stars
De quoi ça parle ?
Suite à une série de guerres de religion de trop et l’incapacité des gouvernements à faire quoi que ce soit, la société s’est organisée autour de groupes d’affinité, que tout à chacun peu rejoindre à sa guise, ou rester en dehors. Les questions de genre ont été évacuées dans le même mouvement, considérées comme source de trop de conflits.
Dans ce contexte, on suit Mycroft Canner, un ancien tueur en série purgeant sa peine au service des communautés. Le point de départ de l’intrigue est le vol de la liste du classement des personnalités mondiales, qui plus qu’être un article mondain, décrit tout autant qu’il influence le pouvoir des différentes factions et sur lequel Mycroft va être chargé d’enquêter par ses nombreux et influents donneurs d’ordres.
En parallèle, il cherche à protéger un jeune enfant qui, dans un monde ou les religions collectives sont taboues, à le pouvoir d’animer les objets et leur donner la vie.
Mais encore
Par certains aspects, ce premier tome m’a rappelé les livres d’Arkady Martine (et surtout A memory called empire) et ce dans le bon sens. Très centré sur la diplomatie, les dessous du pouvoirs, les arrangements entre factions etc.
L’auteure jongle entre les styles de récits. Si la majeure partie du texte est de la prose classique, elle intercale des rapports d’événements plus neutres, avant de passer brusquement à une structure façon pièce de théâtre, de briser le quatrième mur, parfois quand le narrateur interpelle son lecteur, parfois quand le lecteur, supposé, s’insurge contre les tournures de phrases et points de vue du narrateur. C’est intéressant par moment, gimmicky ailleurs. Et couplé avec les différentes révélations sur les différents protagonistes, narrateur inclus, au fil de l’histoire, c’est parfois un peu déroutant.
Le postulat de départ que les genres ont été abolis influence évidemment l’écriture. Dans le sens où, le neutre étant sensé être la forme standard, les usages de pronoms genrés sont généralement porteurs, soit pour mettre en avant un role social que nous, lecteurices du 21e siècle, associons a tel ou tel genre, soit dans le cas de sous-texte ou de comportements fortement sexuels. Sur ce sujet d’ailleurs, un point sur la traduction (par Michelle Charrier) : la version originale utilise le they neutre profusément, ce que la traductrice à transcrit en on et ons. J’avoue avoir jusqu’à présent surtout rencontré iel et ses dérivés et les premières occurrences du on mais surtout du ons pluriel m’ont pas mal perturbées. On prend le pli et ça ne pose rapidement plus de problème.
Le mot de la fin
L’histoire se tient. Au final, on est bien loin du monde anarchiste que j’avais cru apercevoir dans l’interview d’Ada Palmer, mais ça reste une utopie. Il y a certains éléments qui pourraient rappeler Ceux qui partent d’Omelas d’Ursula K. Le Guin. Mais l’auteure dit avoir surtout été marquée par Micromégas de Voltaire.
Sur le dernier quart de ce tome, certains rebondissements m’ont semblé n’être là que pour étoffer un livre déjà bien épais (près de 900 pages), sans vraiment apporter grand chose. Mais le cliffhanger et l’envie de voir tous les éléments mis en place enfin commencer à se résoudre font que j’ai déjà acheté les 3 autres tomes publiés de la série (dans leur version originale).